Grilles d'analyes pour étudier les textes littéraires



1/ Pour étudier un texte narratif / descriptif


à Grille d’analyse d’un texte narratif et/ou descriptif :

 

1.             Observez le paratexte de l’extrait qui peut vous guider dans votre lecture :

1.1. L’auteur ( + chapeau d’introduction du texte qui livre au lecteur le contexte de création de l’œuvre).

1.2. Le titre de l’œuvre (qui peut être précieux pour identifier les formes de discours narratives et descriptives), la date de publication.

 

2.          Identifiez la forme narrative et descriptive grâce au système temporel du récit qui se réfère aux temps de la narration : dominance des temps de l’imparfait (pour les actions de second plan, pour la description, pour exprimer des actions répétées ou habituelles) ;  du passé simple de l’indicatif (pour les actions de premier plan, mises en relief dans le récit, dans la narration), du présent de narration (qui créé un effet de surprise au milieu des tps du passé, ou qui met l’action du personnage sous les yeux du lecteur et au cœur du récit).

 

3.          Intéressez-vous au système énonciatif ( au conditions de production du discours) :

 

3.1. Questionnez-vous sur le narrateur, qui voit la scène ?

3.1.a. La focalisation ou le point de vue interne : le narrateur-personnage raconte à la P1 « je » ou le narrateur montre la  scène à travers le regard d’un personnage du récit à la P3 (ex : il l’aperçut enfin : au premier abord, il la trouva laide :indices : présence de verbes de perception ).

3.1.b. Le point de vue omniscient (= ou focalisation zéro) : le narrateur ne parle pas à la P1 mais utilise la P3, le narrateur non identifiable se comporte comme un dieu qui sait tout des personnages (leurs pensées, leurs sentiments, émotions, réactions).

3.1.c.  Le point de vue externe (très rare dans la littérature) : le narrateur raconte de manière neutre, objective, sans commentaires et sans rien connaître des personnages, à la manière d’une caméra objective : il ne décrit que les gestes physiques des personnages.

 

3.2. Qui parle ?Quel est le statut du narrateur dans le récit ?

3.2.a. Il est absent de l’histoire, non impliqué, comme extérieur à ce qu’il raconte.

3.2.b Il est présent dans l’histoire qu’il raconte à titre de témoin (exemple du récit dans le récit ( = mise en abyme) raconté par un personnage) .

3.2.c Il est présent dans l’histoire qu’il raconte en tant que participant à l’action : c’est un narrateur-personnage.

 

3.3.3 La présence de commentaires ou de jugements dans le récit est-elle le fait du personnage ? Du narrateur ? De l’auteur ? Qu’apportent ces commentaires dans le récit (pause ou rupture dans le récit) ? Implique-t-elle une visée argumentative sous-jacente de l’extrait : est-ce une narration / description au service d’une argumentation ?

 

3.3.4.. A qui s’adresse le narrateur ? Destinataire explicite ou implicite ? Essayez de justifier ou d’expliquer l’adresse au destinataire (dessein, but recherché par le narrateur ?) Sous quelle forme littéraire s’adresse-t-il à lui (récit, lettre, journal intime, journal de bord, discours, dialogue, monologue, etc. ) ?

 

3.3.5. Quelles sont les conditions de production de l’énonciation : quand ? Où est produit l’énoncé (on ne le sait pas toujours) : seulement dans le cas d’une lettre, d’un  journal intime, d’un récit dans le récit, etc. Observez les mentions de dates, de lieu de production de l’énoncé.

 

4. Dégagez la composition de l’extrait : cohérence et progression des étapes narratives, insertion de passages descriptifs (quels sont leur rôle dans le récit ou leur effet ?), analyse des connecteurs temporels et logiques (=mots de liaisons) :

4.1. Comment s’enchaînent les actions (de manière logique, spatiale, chronologique ou non) ?

4.2.Effets chronologiques et rythmiques spécifiques :

4.2.a. Ellipses narratives : sauts dans le temps dans le futur (=pendant un mois, on ne sait pas ce qui s’est passé entre le début d’une action et une autre, par exemple) ? Que créent-elles dans l’atmosphère du récit ?

4.2.b. Analepses (= retours en arrière) ;

4.2.c. Prolepses : le narrateur rompt l’effet de surprise en révélant au début de l’extrait l’ultime destinée du personnage, par exemple sa mort à l’issue d’un combat annoncée au début de l’extrait avant la provocation du conflit.

4.2.d. Rythme du récit ? Lent, rapide, irrégulier ? Pourquoi ? Quel effet est recherché dans le texte par rapport à ce qui est raconté (le thème, une scène particulière)?Est-ce un tableau descriptif (un arrêt sur image) , une scène (récit + dialogue dont le rythme est très proche de la réalité, ou au contraire un sommaire (un résumé d’actions) ? En cas de présence de dialogues, quels sont ses fonctions, ses effets dans le récit ?

 

5. Observez et analysez la typographie (= la mise en page, disposition du texte), la ponctuation dominante et ses effets dans le rythme et la tonalité du récit, la longueur, la syntaxe(= la grammaire), la forme (négative / affirmative) et le type de phrases (exclamative/ déclarative/ interrogative/ injonctive=impérative).

 

6. Intéressez-vous au lexique (vocabulaire, registre de langue (soutenu, courant, familier ou vulgaire), aux champs lexicaux (groupes de mots appartenant à un même thème) dominants, aux réseaux lexicaux, aux registres (comique, tragique, fantastique, merveilleux, burlesque, grotesque, polémique, etc).

 

7. Repérez, identifiez et analysez les effets stylistiques : les figures de style et de rhétorique(= art de bien parler, écrire) (métaphore, comparaison, répétitions, anaphores, métonymies, etc.) et demandez-vous ce qu’elles apportent au texte et à son message. Ne vous contentez pas d’identifier une figure sans l’analyser ( ça n’ajouterait aucun point à la copie!).

 

8. Analysez les procédés de substitution : reprises pronominales, nominales ( àquels mots désignent les personnages), les expansions nominales (PSR, adjectifs, CDN = mots qui caractérisent et décrivent les personnages) qui mettent en relief tel ou tel aspect du portrait du personnage dans une description.

 



2/ Pour étudier un texte argumentatif


1/ Rappel du schéma argumentatif: dans l’art de convaincre, la rigueur argumentative est plus apparente que dans l’art de persuader.

thèse (opinion qu'on veut défendre) --> arguments (preuves qui appuient l'argumentation ) --> exemples (faits qui illustrent les preuves)

 

à Convaincre c’est donc prouver la valeur générale de son opinion dans une démonstration rigoureuse qui se rapproche de l’explication scientifique : pour établir la certitude des faits démontrés, celui qui veut convaincre a recours au schéma argumentatif.

 

à Persuader c’est donc chercher à obtenir l’adhésion à ses propres opinions d’un destinataire particulier en faisant spécifiquement appel à la sensibilité, en exprimant l’intensité de l’émotion et non en tentant de raisonner de manière rigoureuse.

 

2/ L’art de la polémique.

 

Polémiquer c’est débattre d’un sujet (polemos signifie en grec « guerre ») et viser un adversaire dont on veut dénoncer l’attitude. Le débat politique est l’une des formes de polémique. Souvent la polémique cherche à discréditer un adversaire aux yeux d’un public.

 

3/ Etudier un texte à visée polémique :

 

a/ Observez le genre de la polémique : un discours ? un dialogue fictif ou retranscrit ? un dialogue théâtral ? une lettre ? un essai ? Demandez-vous pourquoi l’auteur a choisi tel ou tel genre ? Pour déguiser son opinion ? Pour au contraire l’affirmer haut et fort ? Pour mieux ridiculiser l’adversaire ?

 

b/ Repérez, si possible le schéma argumentatif (thèse/arguments/exemples) : dans un texte polémique ce schéma peut être partiel, car quelquefois simplifié, caricaturé pour être plus efficace.

 

c/ Dans un dialogue, observez la répartition de l’échange : est-elle proportionnée ? Si oui, cela prouve l’égalité de l’affrontement des deux adversaires. Sinon, celui qui parle le plus prend souvent le dessus sur son adversaire.

 

d/ Repérez les types d’arguments : exemple-argument / argument d’autorité (= que l’on ne peut contester, imposé par quelqu’un qui l’énonce, argument autoritaire)/ argument par analogie (=par comparaison)/ argument qui généralise le propos.

 

e/ Analysez la stratégie argumentative de chacun des adversaires : est-elle offensive ? défensive ? très développée ou non ? Subtile ou au contraire plutôt grossière ?

 

f/ Observez les marques de présence du locuteur :est-il très présent ? Parle-t-il à la P1 ? P4 ? Quelles sont les marques de modalisation ?

 

g/ Observez les marques de présence de l’adversaire :comment est-il désigné (quelle personne ?)? traité ? Quelles sont les marques de modalisation ?

 

h/ Quelles sont les valeurs supposées partagées par le locuteur et son destinataire ? ou au contraire qui les opposent ? Quelles sont les idées reçues récusées par le locuteur ?

 

i/ Observez aussi les procédés rhétoriques destinés à mieux séduire et à remporter l’adhésion :

            à lexique et images emphatiques (=exagérées) qui mettent l’accent sur l’émotion : exemple : métaphores, comparaisons.

            à lexique dépréciatif ou au contraire mélioratif pour défendre une idée.

            à Recours aux fausses questions ou questions oratoires.

            à Procédés syntaxiques qui mettent en valeur le propos défendu : accumulations, répétitions, anaphores, parallélisme de construction des phrases, tournures impératives, exclamatives qui cherchent à provoquer des réactions émotionnelles.

 



3/Les figures de rhétorique 


 

La figure de style est un procédé qui modifie le langage, afin d’accentuer son efficacité ou créer un effet de surprise,  poétique, de sens ou de sonorité. Les figures de style peuvent ainsi servir toute forme de discours. Elles sont construites sur le décalage entre signifiant et le signifié. Le signifiant est le mot, la suite de lettres et de sons qui composent le mot. Le signifié correspond à l’idée transportée par ce mot.

 

1.     Les figures de pensée :

 

a.     Les figures d’analogie

  • La comparaison : elle rapproche, établit un lien de ressemblance entre deux éléments .Elle est composée d’un comparé, d’un comparant et d’un outil de comparaison*.

Ex : « Le chemin sinueux comme le sable au vent », Marguerite Yourcenar, Mémoires d’Hadrien. * pareil à, tel(le), semble, apparaît comme, etc. (ne se limite pas à la conjonction « comme »). à A est comme B.

 

  • La métaphore: c’est une comparaison sans outil de comparaison. Le lien de ressemblance entre le comparé et le comparant est donc beaucoup plus fort. à A est B.

Ex : « Votre âme est un paysage choisi ».Paul  Verlaine, Fêtes galantes

* On distingue deux sortes de métaphores :

  1. la métaphore in praesentia: où l'élément réel est cité. Ex: "ses yeux de braise »
  2. la métaphore in absentia: où l'élément réel n'est même plus cité (substitution totale). Ex: "cette faucille d'or (= la lune en croissant) dans le champ des étoiles." (Victor Hugo).

* On parle de métaphore filée lorsqu’elle est développée sur plusieurs lignes ou vers.

 

·         La personnification : elle attribue à un objet ou à un animal des caractéristiques humaines.

Ex : : « Venise pour le bal s’habille » Musset

 

  • L’allégorie : proche de la personnification, elle consiste à représenter, à parler de valeurs abstraites à l’aide d’images concrètes.

Ex : La mort à représentée sous les traits de la Faucheuse ; la femme qui brandit le drapeau dans le tableau de Delacroix, La Liberté guidant le peuple.

 

  • Le symbole : (c'est le contraire de l'allégorie) : un élément concret se charge d'abstraction, finit par exprimer une idée.

 Ex: La mort du loup d'Alfred de Vigny, symbole de la condition humaine. La colombe :la paix.

 

b.    Les figures de substitution

 

  • la métonymie: elle remplace une idée par une autre liée à la première par un rapport logique ou symbolique : on remplace l’objet par son créateur. Ex :« lire un Zola»

 

  • la synecdoque  est une métonymie particulière, elle désigne le tout par la partie, ou la partie par le tout. « les voiles » pour les bateaux par exemple. Ex :« Boire un verre », etc.

 

 

  • la périphrase désigne une réalité par un de ses aspects caractéristiques sans la nommer directement. Ex : « le roi de la jungle » pour le lion.

 

c.     Les figures d’amplification

 

  • L’hyperbole : elle consiste à exagérer un trait, une image, un fait… L’hyperbole vise à impressionner le destinataire. Ex : « Ces moments me seront toujours présents, quand je vivrais cent mille ans… » J.J Rousseau.

 

  • L’antiphrase : figure typique de l’ironie, elle consiste à exprimer le contraire de ce que l’on veut dire. Ex : Comme tu es perspicace !
  • Le paradoxe : énoncé qui parait contenir une contradiction, qui va contre l’opinion commune, la doxa. Le paradoxe est très efficace dans une argumentation, car il surprend et remet en cause les évidences. Ex : « On est quelquefois aussi différent de soi-même que des autres ». La Rochefoucauld.
  • L'énumération ou accumulation (plus de trois éléments). Ex: "Un génie, un savant, un grand homme, une gloire."

 

d.    Les figures d’atténuation

  • La litote : elle dit moins pour suggérer plus. Ex : « Je ne suis pas mécontente de vous quitter ». « Va, je ne te hais point » Corneille.  Ce jeune homme n’est pas sot 
  • L’euphémisme : il cherche à atténuer la brutalité d’une réalité. Ex : Le troisième âge, les non-voyants, il  nous a quitté, il a disparu = il est mort, le soir de la vie…
  • La prétérition : ce procédé consiste à annoncer quelque chose en le disant qu'on ne va pas en parler. Ex : Je ne voudrais pas me mêler de ce qui ne me regarde pas, mais…

 

 

2.     Les figures de répétition : ce procédé joue sur la reprise de mots ou de structures  pour accentuer la pensée

 

·         L’anaphore: répétition d’un mot ou d’un groupe de mots, en tête de vers ou de phrases.

Ex : Le poème « Il ya » De G. Apollinaire, Poèmes à Lou est construit sur ce procédé en début de chaque vers.

  • La gradation: succession de mots ou de groupes de mots d’intensité croissante ou décroissante.  Ex : Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue. Racine, Phèdre
  • La répétition : un même mot est repris plusieurs fois, et les mots répétés sont séparés dans la phrase ou dans le texte. Ex : « Je lui donnai ce que le jour m’avait donné ». P. Eluard
  • La reprise : un même mot est repris plusieurs fois mais ces mots ne sont pas séparés:

Ex : "Volupté, volupté qui fut jadis maîtresse".

 

3.     Les figures de construction : elles jouent sur l’ordre et le choix des groupes de mots ou de la syntaxe

  • Le parallélisme : reprend une structure syntaxique semblable pour deux énoncés.

Ex : Celui-là est riche, qui reçoit plus qu’il ne consume ; celui-là est pauvre, dont la dépense excède la recette. La Bruyère

  • Le chiasme : reprend des mots ou des catégories grammaticales dans un ordre inversé AB/AB devient donc AB/BA.

Ex : Le matin est neuf, neuf est le soir. Robert Desnos. « Ce n’est pas l’Etat qui appartient au Prince, c’est le Prince qui appartient à l’Etat. » Diderot

  • l’antithèse : elle rapproche des mots qui désignent des réalités opposées.

Ex : « Et monté sur le faîte il aspire à descendre » Corneille

  • l’oxymore : (NB : nom masculin) il réunit dans une même expression deux réalités opposées.

 Ex : « sénile nourrisson » Mallarmé àeffet d’étrangeté créé

  • L’attelage  : il rapproche deux compléments désignant un élément concret et un élément abstrait.

Ex : Il admirait l’exaltation de son âme et les dentelles de sa jupe. Flaubert. Ici, le rapprochement de « l’âme » et de la « jupe » provoque un effet comique et illustre l’ironie flaubertienne. Ex: "Vêtu de probité candide et de lin blanc." (Booz endormi de Victor Hugo).

  • L’asyndète ou la parataxe : elle consiste à supprimer tout mot de liaison entre des groupes syntaxiques qui sont pourtant liés. « …le poison me consume ; ma force m’abandonne ; la plume me tombe des mains… » Montesquieu
  • L’hypotaxe c’est le contraire de l’asyndète, elle multiplie les mots de liaison entre des groupes syntaxiques. « je sentis tout mon corps et transir et brûler » Racine, Phèdre.

 

Les jeux sur les sons, l’ecriture

 

·         L’assonance : c’est la répétition d’une même voyelle.

Ex :« Tout m’afflige et me nuit et conspire à me nuire ». Racine

  • L’allitération: c’est la répétition d’une même consonne.

Ex :« Pour qui sont ces serpents qui sifflent sur nos têtes ». Racine

  • Lorsque l'assonance ou l'allitération a pour effet d'imiter un bruit et seulement dans ce cas, on parle d'onomatopée ou d’harmonie imitative (cas très rare).
  • la paronomase est le rapprochement de mots ayant des sonorités communes mais des signifiés différents.

Ex : Le cygne/ le signe, les mots/les maux etc.

  • Le calembour : jeu sur le sens, la prononciation ou l'écriture d'un mot.

Ex: "Les miroirs feraient mieux de réfléchir un peu avant de renvoyer notre image" (Cocteau).

  • L'anagramme consiste à former un mot avec les lettres d'un autre. Ex: Boris Vian = Bison Ravi.
  • La contrepèterie: il s'agit d'intervertir des lettres ou des syllabes.

Ex : « Trompez sonnette ! » à la place de « Sonnez trompette ! »

  • L'acrostiche: les premières lettres des phrases forment un nom.

Ex:

La nuit descend,

On y pressent,

Un long, un long destin de sang. (Apollinaire, Poèmes à Lou).

 

Les écarts de langage

 

·         Les néologismes: ce sont des mots créés: "le patrouillotisme" de Rimbaud, « les proêmes », « l’objeu » de F.Ponge

·         Les archaïsmes: emploi de mots déjà vieillis pour l'époque. Ex "chef" pour tête aujourd'hui.

·         Emploi de termes techniques, de l'argot...

·         Emploi de termes péjoratifs, neutres ou mélioratifs. Ex: "larbin", "domestique" et "gens de maisons".

·         L'orthographe: "Nouillorque" pour New York. Le prestige de cette ville est atténué par l'évocation du mot "nouille".

·         Les barbarismes: Faute grossière de langage, particulièrement celle qui consiste à employer des mots forgés ou déformés, à se servir d'un mot dans un sens qu'il n'a pas. Ex:"J'te craignons point." Dom Juan de Molière.

 



4/ Pour étudier le théâtre


Ø  Rappels : règles du théâtre classique :

 

  1. Règle des 3 unités établies par Aristote (IVè s. avt J.C.) et reprise par théoriciens du XVIIème :Boileau, Art poétique : unité de lieu, de temps et d’action pour renforcer l’illusion théâtrale : au nom de la clarté et de la raison .
  2. Règle de la vraisemblance : l’action et les personnages doivent être crédibles et donner une impression de vérité.
  3. Règle de la bienséance : le dramaturge doit veiller au respect des conventions morales, religieuses et des usages pour ne pas choquer les spectateurs.

 

Le genre théâtral a sa spécificité : une oeuvre théâtrale est destinée à être représentée sur scène. Pour en comprendre les enjeux et tenter des interprétations, il faut se poser les bonnes questions à travers les points d’analyse suivants (inspirés du manuel Méthodes du français, « Bordas », 2001.) :

 

 

I/Analyser le contexte de l’œuvre théâtrale.

 

a/ Dans quelles circonstances historiques, politiques, sociales ou littéraires  la pièce a-t-elle été produite ?

b/ A quel moment de la vie de l’auteur ? Œuvre de jeunesse ?de maturité ? écrite à un tournant de sa vie ?

c/ Evénements qui ont pu influencer son œuvre ?

d/Conditions de représentation de la pièce ? Bonne ou mauvaise réception ?Objet d’un scandale ?ou d’un engouement ?Informations sur le lieu de représentation de la pièce ? Le décor ? Les costumes ? Tel ou tel parti pris de mise en scène ?

 

II/ Identifier la forme théâtrale (le sous-genre) à laquelle appartient la pièce ou l’extrait.

 

a/ Identifier avant tout les thèmes, les registres littéraires, le niveau de langue ou disposer d’informations concernant le projet de l’auteur, son respect ou non des règles de composition permet d’identifier le sous-genre auquel l’extrait appartient.

 

b/ Les différents  sous-genres :

 

1.    La tragédie : pièce de théâtre en 5 actes qui met en scène des personnages victimes de la fatalité (le fatum) et des actions nobles. Son dénouement est malheureux, funèbre et prévisible et cherche à susciter chez le spectateur sa pitié, sa compassion, son admiration, sa crainte. Sources de la tragédie : Antiquité, XVIIè s. . Registres littéraires : tragique, pathétique, épique ; niveau de langue :soutenu. Ex : Phèdre, de Racine.

 

2.    La comédie : pièce de théâtre ( au départ en 5 actes) qui met en scène des personnages roturiers qui affrontent et surmontent des obstacles liés à leurs conditions sociales ou à leur caractère. Son dénouement est heureux. Registres : comique, satirique, burlesque, grotesque.  Sources de la comédie : Antiquité, farces médiévales, commedia dell’arte italienne, Molière.

 

3.    La tragi-comédie : pièce de théâtre qui mêle les registres tragiques et comiques : son dénouement est heureux. Ex : Le Cid, Corneille.

 

4.    Le drame bourgeois : apparu au XVIIIème siècle. Registres : pathétique, réaliste. EX : Diderot, Le fils naturel.

 

5.    Le drame romantique : pièce de théâtre née avec le mouvement Romantique (chef de file : V.Hugo) vers 1830 qui constitue une révolution littéraire, artistique. Les dramaturges romantiques s’affranchissent des règles contraignantes, mélangent tous les registres : sublimes et grotesques, tragiques et comiques, etc. Ex : Hernani, V. Hugo.

 

6.    Le théâtre au XXème siècle : difficile à classer. « Le théâtre de l’absurde » se distingue parmi les pièces contemporaines : il remet fondamentalement en cause la construction dramatique traditionnelle, les fonctions des personnages, du langage et déconstruit l’action. Ses représentants : Beckett, Ionesco. Registres : comique, burlesque, grotesque, tragique. Il suscite autant le malaise que le rire chez le spectateur, créé une impression d’étrangeté, d’absurde, et le fait réfléchir aux questions existentielles.

 

 

III/Analyser les composantes et les stades de l’intrigue, de l’action.

1.    Le temps et l’espace : analyser :

a/Le traitement des lieux et du temps de l’action : est-il classique ?moderne (complètement déconstruit, désorganisé) ?

b/Durée de l’action ? Présence d’ellipses temporelles ? Un seul ou plusieurs lieux de l’action ? Rechercher tous ces indices dans le dialogue, les didascalies ou le chapeau d’introduction de l’extrait.

c/ Analyser si  les indices spatiaux et temporels renvoient à un univers à une époque socialement et historiquement ancrés (à rechercher aussi dans l’étude des noms des personnages, leurs costumes, leurs propos).

 

2.    L’action dramatique et ses phases : identifier le stade de l’intrigue proposé par l’extrait : est-ce ?

a/ La scène d’exposition ?(qui introduit l’intrigue, le cadre spatio-temporel, présente les personnages).

b/ Le nœud de l’intrigue ? et ses différentes péripéties ? Quels sont les obstacles à surmonter ?

c/ L’aboutissement de l’action : son dénouement ? Les objectifs sont atteints ou non ?

 

IV/ Analyser l’échange verbal : le dialogue.

a/ Estimer la part des didascalies et des répliques des personnages.

b/ Liberté laissée ou non au metteur en scène ?

c/ Analyser la situation de communication : qui parle ? à qui ? au personnage ? au spectateur ? dans ce cas on parle de double énonciation théâtrale (1er destinataire du dialogue : le personnage ; 2ème : toujours les spectateurs) Quel code (langue ? niveau de langue ?) est utilisé dans l’échange verbal ?

d/ Analyser le type de réplique :

courtes ou longues ?

monologue ?

tirade ?

Stichomythie (répliques qui fonctionnent deux par deux, dans une construction parallèle)

Récit inclus dans une réplique ?

Qui les prononce ?

e/ Qui mène et domine l’échange (observer le temps de parole des personnages)?Signification de ce temps de parole ?

 

V/ Analyser les personnages.

a/ Identité ? Type de personnage ? Figure mythique ? historique ? Personnages qui appartiennent à la tradition théâtrale ? ou originaux ?

b/ Traits physiques ? Psychologiques ? (observer les didascalies : costumes, objets).

c/ Analyse du schéma actantiel : des forces en présence dans l’intrigue.

 

 

Opposants                                                                                                    Destinateurs

 

 

 

 

--------------------------------------------->Sujet                                                                                                             Objet

 

 

 

Adjuvants                                                                                                      Destinataires

 

 

 

d/ Analyser leur classe sociale, leur situation familiale. Liens conflictuels ? de solidarité ? d’intérêt ? d’affection ?

e/ Evoluent-ils ou non ?Comment ?

f/ Leurs gestes et leurs paroles sont-ils cohérents ou en contradiction ?

g/ Dimension symbolique des personnages ? Valeur ou idée incarnée ? Représentants d’un groupe social ?

 

VI/ Analyser  la visée du dramaturge.

a/ Castigat ridendo mores (comédie).

b/ Plaire et divertir.

c/ Emouvoir (tragédie).

d/ Critiquer (portée moralisatrice).

e/ Inquiéter, faire réfléchir.



5/ Les registres littéraires


Registre pathétique : du grec pathein «souffrir »,  il naît de la vue des souffrances d’autrui qui crée de la compassion chez celui qui lit ou regarde celui qui souffre. Cela peut-être provoqué par la douleur, l’horreur, la terreur, la tristesse.

Les procédés du pathétique sont marqués par un lexique de l’affectivité, de la souffrance, de l’exagération, par l’introduction du discours direct qui fait entendre la voix de la victime et par la fréquence des modalités interrogatives et exclamatives.

ex : monologue d’Antigone où on sait qu’elle est condamnée à être emmurée vivante pour avoir enseveli son frère malgré l’interdiction du roi  (les didascalies insistent sur la faiblesse d’Antigone : elle a froid, elle est seule, elle murmure); mort de Manon dans le désert dans Manon Lescaut de l’Abbé Prévost…


Registre tragique :  il naît de la souffrance de héros souvent solitaires, confrontés aux drames de la destinée humaine, à la fatalité, au mal, à la mort ( chronique d’une mort annoncée).

Le langage est souvent soutenu, l’accent est mis sur la situation désespérée du personnage qui est confronté à des forces qui le dépassent.

ex : Roméo et Juliette (tragédie de la passion) de William Shakespeare : les 2 personnages sont confrontés à la haine qui oppose leur 2 familles, c’est pourquoi ils ne réussiront à vivre en paix, ils décideront de se suicider pour se rejoindre dans un monde meilleur.

 Bérénice de Racine ( tragédie politique) qui montre la difficulté de gouverner et d’aimer, cette pièce met en scène l’incompatibilité du pouvoir  et de l’amour et enfin Antigone de Sophocle ou d’Anouilh qui montre combien il est difficile de s’opposer aux lois, même injustes, édictées par un roi.


Registre épique : il emprunte ses caractéristiques au genre de l’épopée, long poème antique (L’odyssée ou L’Iliade d’Homère) ou médiéval ( La chanson de Roland) qui raconte les exploits souvent guerriers de héros surhumains, confrontés à des obstacles colossaux, dans un univers immense où s’exercent encore des forces surnaturelles ( ex : le cyclope, les pouvoirs de la magicienne Circée ou les dieux comme Poséidon dans L’Odyssée).

Un texte épique vise à susciter l’effroi, l’étonnement, l’admiration.

Les procédés sont ceux de l’agrandissement : pluriels, hyberboles, superlatifs ( le plus grand), comparaisons et métaphores hyperboliques.


Registre lyrique : en littérature, on appelle poésie lyrique les textes qui expriment des sentiments. Les thèmes sont variés : amour (Paul Eluard La courbe de tes yeux : Le monde entier dépend de tes yeux purs / Et tout mon sang coule dans leur regard), fuite du temps ( Ronsard Mignonne, allons voir si la rose, Apollinaire), goût de la nature (Sensation d’Arthur Rimbaud : Par les soirs bleus d’été, j’irai par les sentiers/ Picoté par les blés, foulé l’herbe menue…), le bonheur, le joie.

Les procédés reposent essentiellement sur l’utilisation de la 1ère personne, sur le lexique des sentiments, les modalités exclamatives et interrogatives.


Registre élégiaque : celui de la plainte (deuil, déploration) : lexique de la souffrance, de la solitude, de la plainte

ex : Les Elégies de Ronsard, de Chénier, certains poèmes de Lamartine, Verlaine Il pleure dans mon cœur comme il pleut sur la ville, poème extrait des Romance sans paroles.


Registre polémique : qui suppose une attitude critique, qui vise une discussion vive ou agressive.

Les procédés sont multiples : exagération ( superlatifs, hyperboles), simplification ( formule-choc résumant une thèse), lexique dévalorisant, figures d’ironie, visant à susciter le mépris.

ex : Lettre au président Félix Faure de Zola J’accuse qui condamne l’accusation portée contre Dreyfus. Zola défend Dreyfus.

 Le nègre de Surinam de Voltaire (texte extrait de Candide) dans lequel un Noir esclave montre à quel point sa situation est révoltante : il est mutilé , en haillon alors qu’il travaille et que les Européens font de l’argent sur son dos. Il explique que nous descendons tous d’Adam et Eve et qu’il faut donc traiter tous les hommes de la même manière, c’est d’ailleurs ce que lui ont appris les Hollandais qui ont voulu le convertir au christianisme.


Registre comique : c’est celui qui provoque le rire : il peut être satirique ( on se moque de la société dans laquelle on vit), il peut introduire le burlesque (utilisation d’un style familier pour parler d’un sujet noble, comme lorsque qu’on rabaisse un roi dans Ubu roi de Jarry), le grotesque (comique de caricature, grossir les traits).

ex : De nombreuses pièces de Molière jouent sur le comique de geste, de situation et de mots. on trouve aussi la comédie de mœurs avec Labiche Un chapeau de paille d’Italie ouYasmina Reza Art.


Registre réaliste : il présente des personnages, des lieux, des objets, des situations, qui ont existé ou pourraient avoir existé dans le monde réel ordinaire.

Les procédés reposent sur une description précise du quotidien (véhicule, vêtement, milieu social).ex : Les contes de la Bécasse de Maupassant, Boule de suif du même auteur (récit d’une prostituée généreuse qui fait un trajet avec des Bourgeois qui profitent d’elle et s’en moquent. La nouvelle propose une réflexion sur : respecter la morale de son temps, est-ce suffisant pour être une personne digne d’intérêt ?)


Registre fantastique : il se caractérise par l’intrusion d’un élément surnaturel dans un monde qui ne l’est pas, ceci déstabilise le personnage et le lecteur qui doutent. Cela produit un effet inquiétant. C’est l'hésitation éprouvée entre une interprétation rationnelle et irrationnelle (selon Todorov).

Si nous prenons l’exemple du Horla de Guy de Maupassant : on hésite à la fin entre une interprétation rationnelle, le narrateur est fou et subit des hallucinations ou bien un être surnaturel hante véritablement sa maison et alors notre explication du monde se trouve mise en déroute (interprétation irrationnelle). Nous n’avons pas la réponse, la nouvelle se termine dans ce doute. Le début de Dracula de Bram Stoker est construit sur ce même principe : Jonathan Harker voit des choses qui lui paraissent totalement irrationnelles et il finit par se demander si ça n’est pas un cauchemar ou le fruit de son imagination délirante.


Registre merveilleux : suppose la présence d’éléments surnaturels dans un récit (conte, roman de science-fiction, d’anticipation) tels que des animaux ou personnages qui parlent, des êtres fabuleux (elfles, fées, monstres, dragons, etc.) : à NPC avec le registre fantastique : le merveilleux est accepté comme tel dans la fiction, ne pose pas problème (ni aux personnages, ni au narrateur) contrairement au registre fantastique. Ex : les contes traditionnels (Perrault, du Moyen-Age, etc .)


6/ Les formes de l'argumentation : l'argumentation directe / indirecte

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Tableau synthétique qui permet de distinguer l'argumentation directe / indirecte dans les textes argumentatifs
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